Remplacer la charité par l'argent


À la fin du premier chapitre de la quatrième partie du roman de George Orwell Une fille de pasteur, l’héroïne, Dorothy, est sauvée de la misère par un cousin riche. Dès que celui-ci s’intéresse à elle, toutes les portes s’ouvrent. Miséreuse, il lui était impossible de trouver un travail. Riche, elle obtient un emploi sans aucun problème.

Ce chapitre se conclut par ces mots :

« Cela lui faisait penser, plus que jamais auparavant, au mystérieux pouvoir de l’argent. En fait, cela lui rappelait ce que disait M. Warburton : si l’on prenait la Première Épître aux Corinthiens, chapitre 13, et que l’on remplaçait “charité” par “argent” dans chaque verset, ce chapitre prenait dix fois plus de sens qu’avant. »

Je me suis amusé à faire ce que notre cher Orwell suggère ci-dessus et j’ai revu le texte de Saint-Paul pour en faire ceci :

« Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas d’argent, je suis un airain qui résonne ou une cymbale qui retentit.

Quand j’aurais le don de prophétie, que je connaîtrais tous les mystères, et que je posséderais toute science ; quand j’aurais même toute la foi, jusqu’à transporter des montagnes, si je n’ai pas d’argent, je ne suis rien.

Quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n’ai pas d’argent, tout cela ne me sert de rien.

L’argent est patient, il est bon ; l’argent n’est pas envieux, l’argent n’est point inconsidéré, il ne s’enfle point d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant, il ne cherche point son intérêt, il ne s’irrite point, il ne tient pas compte du mal ; il ne prend pas plaisir à l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ; il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout.

L’argent ne passera jamais. S’agit-il des prophéties, elles prendront fin ; des langues, elles cesseront ; de la science, elle aura son terme.

Car nous ne connaissons qu’en partie, et nous ne prophétisons qu’en partie ; or, quand sera venu ce qui est parfait, ce qui est partiel prendra fin.

Lorsque j’étais enfant, je parlais comme un enfant, je pensais comme un enfant, je raisonnais comme un enfant ; lorsque je suis devenu homme, j’ai laissé là ce qui était de l’enfant.

Maintenant nous voyons dans un miroir, d’une manière obscure, mais alors nous verrons face à face ; aujourd’hui je connais en partie, mais alors je connaîtrai comme je suis connu.

Maintenant ces trois choses demeurent: la foi, l’espérance, l’argent ; mais la plus grande des trois c’est l’argent. »

Je vous laisse méditer…